Saint Matthieu est l‘évangéliste qui nous accompagnera pendant toute cette année liturgique A ; ce sont dès lors de larges extraits de son évangile que nous entendrons aux messes dominicales tout au long des semaines et des mois à venir. L’occasion de faire connaissance avec lui.
Petit rappel d’abord : les premiers chrétiens tiennent une place fondamentale dans la foi des chrétiens. Jésus n’a rien écrit. Personne n’a noté sur les routes de Palestine quels étaient ses faits et gestes. Pas de journalistes, pas d’historiens. Seulement des amis, des disciples qui se souviennent comme chacun se souvient.
Puis viennent, pour ces disciples, la mort et la Résurrection de Jésus… et l’expérience de l’Esprit. Ses disciples ne commencent pas par écrire, mais par vivre, par prier, par célébrer (notamment la « fraction du pain » le matin du « premier jour de la semaine » qui deviendra plus tard notre « dimanche ») et par proclamer que Jésus est vivant.
Leur prédication peut se résumer ainsi : « Jésus de Nazareth, que vous avez tous bien connu, vous l’avez mis à mort. Dieu l’a ressuscité, comme l’annonçaient les Ecritures…Croyez donc et convertissez-vous ». C’est ce que l’on appelle d’un mot grec le « kérygme ».
Peu à peu, devant les auditoires qui n’ont pas connu Jésus, il faut détailler qui il est. Autour du récit dramatique de la Passion et de la Résurrection (qui constituent les premières mises par écrit) se regroupent d’autres souvenirs : faits et gestes de Jésus, et ses paroles, gravées dans des mémoires habituées à l’enseignement purement oral. Tout cela est repensé à la lumière de la Résurrection, qui lui donne tout son sens. Les missionnaires des premières communautés chrétiennes fixent par écrit des traditions orales ; ainsi se forment, dans la seconde moitié du 1er siècle, les évangiles tels que nous les connaissons aujourd’hui.
L’évangile de Marc a été composé à Rome entre 65 et 70, celui de Matthieu en Palestine entre 75 et 90, et celui de Luc dans les milieux grecs de Syrie entre 65 et 80. L’évangile de Jean, plus tardif dans les années 90, en Asie Mineure.
Comme c’est le cas pour les quatre évangiles, celui de Matthieu n’a sans doute pas été écrit directement par l’apôtre, le collecteur d’impôts que Jésus avait appelé pour en faire un des douze apôtres, mais bien par un lettré juif directement issu de sa communauté. Cet évangile, d’abord écrit en araméen, aurait été traduit en grec dès l’origine.
L’évangile de Matthieu, fortement enraciné dans la foi et la culture juive, s’efforce de montrer en Jésus la réalisation des Ecritures.
Trois thèmes traversent tout le récit :
- Le règne de Dieu annoncé par les prophètes est inauguré par Jésus.
- Toute la vie de Jésus est l’accomplissement des Ecritures ; nouveau David et nouveau Moïse, il est le Messie attendu qui réalise la Nouvelle Alliance dans son sang
- Dans sa mort et par sa Résurrection, il se révèle comme le Fils de Dieu.
Roger Kauffmann (d’après « Théo »
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Cette année, les deux conférences de Carême nous donneront l’occasion d’entrer en plus grande communion intérieure avec cet évangile de Matthieu pour en percevoir les lignes de force (voir ci-après).
Doyenné de Bastogne
Carême 2020
Deux conférences de Carême
Au centre saint François avenue de la gare n°10 à Bastogne
« Ouvrir l’évangile de Saint Matthieu »
Avec sœur Marie-Raphaël, bénédictine du monastère d’Hurtebise.
« Le carême nous invite à prendre du temps pour Dieu, à creuser sa Parole dans l’Ecriture, à nous en nourrir.
Ouvrons l’évangile et mettons-nous à l’école du Maître, Jésus, qui nous parle du Royaume des cieux, nous en donne les clés, nous y fait entrer…
Durant ces deux rencontres, nous parcourrons à grandes enjambées les premiers chapitres de l’évangile selon saint Matthieu, pour en percevoir les lignes de force.
Quel portrait du Christ s’en dégage-t-il ?
Et quelle vision du Royaume annonce-t-il ? »
Jeudi 5 mars à 20h et Jeudi 26 mars à 20h.
Entrée gratuite (une corbeille sera disponible pour ceux qui peuvent participer aux frais)
Pensez à apporter votre Bible.
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LE CARÊME comme un chemin vers soi, vers les autres, vers Dieu…
Γν?θι σεαυτ?ν (GNÔTHI SEAUTON - connais-toi toi-même)
Un Carême à parcourir en allure lente, un Carême pour un « connais-toi toi-même » selon la formule socratique. Une tranche de 40 jours à épicer de saveurs renouvelées comme si la vie se redécouvrait, et vivre cette période avec le souhait qu’elle dynamise toutes les tranches de temps.
Un temps pour dénicher l’Esprit parfois endormi dans l’homme lui-même. Une santé d’Esprit dont l’homme est capable : c’est la tâche à accomplir et à vérifier pendant la quadragésime.
Entrer en Carême c’est vivre en quelque sorte le GNÔTHI SEAUTON du Christ lui-même.
Le Carême : ce temps qui nous rappelle que notre Maison, notre habitat véritable est un chemin.
Quelques balises pour le chemin.
- Vivre le Carême (et s’y préparer) comme un temps qui doit donner son goût à tout notre temps, à toute notre histoire personnelle et collective. Le Carême affine les épices qui donnent du goût et du sel à toute la vie. Un vrai Carême gourmand.
- « Positiver » le Carême. Pas un Carême-corvée, mais un Carême-plaisir, un Carême-secret : « Retire-toi dans ta chambre », « Parfume-toi le visage ».
- Profiter du Carême pour mieux être. Pratiquer des recettes adoucies plutôt que s’entêter dans une spirale ascétique qui courrait le risque d’être le fruit de la seule volonté ; donc un Carême sur mesure dont chacun profile les menus et les exigences. Il s’agit de rejoindre en soi silence et profondeur pour une libération intime, renouvelable et durable… comme une sorte d’écologie spirituelle : ma vie comme un ensemble en équilibre permanent. Le Carême devient un temps de diagnostic pour diminuer, voire éliminer, ce qui fait obstacle à ce devenir personnel qui peut faire de mon cœur un porte-Dieu, le lieu d’une présence d’amour.
- Mettre de côté mes réponses « habituelles » ou « d’habitude » (préciser quelques réponses à viser). Débusquer tous les « je sais que » qui empêchent mon cœur d’aller au large et cibler quelques « certitudes » qui risquent d’être des murailles empêchant d’aller à l’air et aux alizés de l’Esprit.
- (ou dit autrement…) Rouvrir mes boîtes à réponses et en faire sortir toutes mes questions y enfermées ; reprendre ma vie comme chemin à mettre en perspective du large, cette perspective qui me dit de n’enfermer ni Dieu, ni les autres, ni moi.
- Vivre la vie comme un horizon infini où les jours ne cessent d’appeler et d’inventer l’amour infini.
- Me rappeler sans cesse que mon être biologique et psychologique (et émotionnel) est l’apparente enveloppe et même la matrice créée pour générer, avec toutes les semences de la vie terrestre, mon engendrement spirituel ; un engendrement enclin à faire de moi, « à partir de milliards d’éléments », cet esprit-cœur capable d’amour, et devenir fils et frère.
- Se demander régulièrement si je n’enferme pas Dieu, les autres, et si ma propre vie se respire et s’oxygène d’un air libéré de toute prison.
- Jeûner dans tous les domaines et dans tous les étages pour décrasser le corps, le cœur, l’esprit.
- Ecouter plutôt que parler.
- Le chemin du Carême nous fait pratiquer un jogging spirituel mais à allure lente et longue si possible.
- Méditer ceci : ce que j’ai, je suis invité à le rendre. La rentabilité du don vise le plus haut profit et la plus belle abondance, « …rendu au centuple ».
- Un Carême vécu en vérité nous re-personnalise et nous re-visage sans aucune ombre narcissique et sans rimmel masquant.
- Il vaut mieux arrêter Carême et jeûne (à un certain stade) si je vérifie avec conseil demandé que je n’entre pas en miséricorde : discernement essentiel.
- Accepter, demander, laisser entrer la paix en moi et vérifier l’authenticité de cette paix à ceci : elle rallume le feu de l’amour-charité et intensifie le goût d’un vivre vrai.
- Plutôt que suivre la ou les modes, favoriser cette mode qui m’est propre et qui dit quelque chose de mon « sceau personnel », mon secret, ce secret qui signe Dieu.
Philippe Moline
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